Quand la malchance s’invite à table…
«C’est jamais moi qui ai la fève ! j’en ai marre, j’ai jamais de chance !!»
Et un de ses frères de répondre à sa sœur : « Moi, je l’ai quasiment tout le temps »
C’est idiot, mais ces quelques mots de ma fille, m’ont bouleversée.
Je suis restée interdite, je n’ai rien trouvé d’utile et d’aidant à lui répondre.
Moi, la coach ? Quelle honte ! Je suis mortifiée !
Je l’ai regardée, dépitée, et je lui ai dit pitoyablement « oh, ma pauvre louloute, c’est trop triste ! »
Et naturellement, j’ai triché le soir-même, avec sa muette complicité, pour qu’elle ait enfin la fève…
Je m’en suis aussitôt voulue.
Tout le monde s’en est douté mais personne n’a rien dit. Pathétique et admirable ) !
Oui, admirable.
Car au fond, si tout le monde s’est tu, et a participé à cette pieuse supercherie, c’est pour une seule et même raison : l’envie, le besoin de rétablir une certaine justice face à la chance, à rééquilibrer le jeu.
Une forme de solidarité tacite face à cette variable, que nous avons tous rencontré, loupé, ou constaté chez autrui.
Car nous sommes tous conscients, ou fantasmons, le poids de la chance.
Notamment celui de la malchance, que nous grossissons souvent, quand cela nous arrange « La malchance est une circonstance atténuante que la vie donne aux ratés ».
J’ignore de qui est cette citation mais je la trouve souvent juste,(en dépit du mot « ratés » que je n’apprécie guère !)
C’est pourquoi je me suis rapidement reprochée mon manque d’à propos.
Aussi, un peu tardivement, voilà ce que j’aurais dû répondre à ma fille :
« Tu en es sûre ? Tu te souviens d’une année sur l’autre si tu as eu la fève ? (parce que moi non !!) Et même si c’est le cas, ce n’est pas toi qui n’as pas de chance. Nous sommes 5, un seul l’a eu, il y en a qui a plus de chance que les 4 autres, c’est tout. En revanche, si tu te racontes que tu n’as pas de chance, tu risques de ne plus en avoir, de la décourager. Et puis, tant que ça concerne la fève, c’est pas bien méchant ! »
Oui, voilà ce que j’aurai du lui répondre plutôt que de prendre pour argent comptant sa plainte, compatir immédiatement, au risque de renforcer ce qui relève davantage de la croyance que de la réalité, de généraliser une situation qui se limite à l’Épiphanie !
Vous jouez de chance ou de malchance dans votre vie ?
Sans nier pas un pourcentage possible, il me semble que notre croyance intime de rencontrer souvent plutôt l’une (la chance) ou l’autre (la malchance) renforce leur influence, leur présence dans notre vie.
Alors, gare à nos croyances à leur sujet !